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Las Baldies et les FALISSARD

La première trace du hameau de Lasbaldies que nous avons remonte en l’an 1301. Lasbaldie est qualifié de « Mansus Vocatus Beldene », ce qui signifie : Manse appelé Beldene. Au Moyen Âge le ou la manse est une unité d’exploitation agricole comportant, en principe, l’habitation et ses dépendances, la quantité de terre que pouvait cultiver et qui pouvait nourrir une famille ; il constituait en même temps l’unité fiscale servant de base aux prestations exigées par le maître du sol. En 1437, « la Baldie » relève du prieuré de Marcolès, donc du seigneur de Marcolès (le prieuré de Marcolès dépendait des abbés d’Aurillac) Au XVIe siècle on trouve différentes orthographes : en 1539 « Les Baldies », en 1555 dans un acte chez Destaing, notaire « Las Baldra », (le Bel du début du XIVe siècle est devenu Bal), pour devenir aujourd’hui Las Baldies.
- A ce jour je ne sais pas comment les Falissard ont acquit le petit domaine de Las Baldies, apparemment il ne faisait pas partie des ventes de biens nationaux. Pas de trace dans la sous-série 1 Q des Archives Départementales du Cantal. Nous trouvons le 30 avril 1821 dans la succession d’une Catherine Falissard, décédé le 31 octobre 1820 à Marcolès, épouse de Antoine Auzenat, des biens : prés, terres, châtaigneraie, maison, situés à Las Baldies et représentant un capital de 5000 F.
- Dans le contrat de mariage du 15 avril 1809, d’Antoine Auzenat, originaire de Clermont-Ferrand, et de Catherine Falissard, fille de feu Louis, (qui fut le premier maire de Marcolès) et de Jeanne Marie Saingeal, la future ne se constitue qu’un trousseau évalué à 200 F, mais la succession de son père n’est pas effectuée. Las Baldie est peut-être dans la succession paternelle?
- En 1838, les enfants de Catherine Falissard : Jean Félix, Jeanne Justine et Gabriel Louis Auzenat, héritiers de leur mère, décident de se séparer de leur bien de Las Baldies. Ainsi chez le notaire Vic de St Mamet, ils passent une vente au profit de leur cousin Pierre Falissard - à l’époque cultivateur à Canet de Marcolès, village proche de Las Baldies - pour l’acquisition d’un petit corps de domaine situé dans les dépendances du lieu et commune de Marcolès , l’acquéreur doit entrer en jouissance le 25 mars 1839 moyennant la somme de 10.000 F. , dont 5.000 F. payables le 5 mars prochain et le surplus au décès de Antoine Auzenat, veuf de Catherine Falissard, avec l’intérêt légal à compter du dit 25 mars 1839. Donc en 1839 Pierre Falissard et Justine de Meallet s’installent dans leur nouvelle propriété avec déjà huit enfants.
- Lui, né à Marcolès le 14 septembre 1799, fils de Joseph et Marthe Murat, elle aussi née à Marcolès le 21 octobre 1804, fille de Jean de Meallet Del Douzan originaire du village de Polvrières commune de Sénezergues, descendant d’un très ancienne famille de noblesse de chevalerie de la Châtaigneraie et de Marianne Miquel originaire d’Aurillac, descendante d’une famille de notaires qui possédait des biens sur la commune de Marcolès. Donc le 5 octobre 1820 Pierre Falissard, mineur, et Marie Agnès Justine de Meallet aussi mineure, elle n’a pas encore seize ans, s’unissent devant le maire de Marcolès et font leur contrat chez Me Chaumont. Ils s’épousent sous le régime dotal. Marthe Murat donne à son fils le quart par préciput des sommes qui lui ont été reconnues par son mari dans leur contrat de mariage et autres actes postérieurs, sous réserve de l’usufruit sa vie durant. Le quart est évalué à 600 F. Joseph Falissard et Marthe Murat s’engagent à nourrir et entretenir le jeune couple et leurs descendants, ceux-ci rapportant leur travail. Quant aux parents de l’épouse, ils donnent une somme de 2.000 F. qui est remise de suite à Joseph Falissard et une armoire qui ne sera délivrée qu’après le décès des parents de l’épouse.
- Pourquoi un mariage si jeune, les époux sont tous les deux mineurs, lui 21 ans, elle 15 ans. Il est vrai que les filles se mariaient jeunes, des fois à 13 ans. Pour les familles nobles ou bourgeoises, il était important de marier les filles cadettes, qui ne rentreront pas dans les ordres, à de bons partis. Justine était le premier enfant du couple de Meallet/Miquel, elle ne reçu apparemment aucune instruction, savait-elle au moins lire ? je ne le pense pas, écrire certainement pas dans la plupart des actes retrouvés elle déclare ne savoir signer. Son frère Honoré Joseph, son cadet de 3 ans recevra une instruction au collège d’Aurillac, j’ai retrouvé dans les archives de la famille ses cahiers de classe. Il aura la chance d’hériter des biens de son oncle Jean de Meallet (aîné) propriétaire à Polvrières de Sénezergues et décédé sans enfant. En 1830 il épouse Judith Barthomivat de La Besse, fille de Guillaume comte de La Besse, colonel d’état-major au ministère de la guerre et officier de la légion d’honneur. Il est étonnant que Jean de Meallet Del Douzan s’honorant quelques années plus tard d’une belle fille issue d’un milieu bourgeois et fortuné, donne sa fille en mariage à un Pierre Falissard -issu certes d’une famille tout à fait respectable et honorablement connue de Marcolès - mais sans argent. Une histoire est pourtant arrivée jusqu'à moi : « Pierre Falissard était cocher au service des Meallet, qui habitaient Cols, il se serait intéressé de près à la jeune Justine, tellement proche que le mariage semblait inévitable ». Je veux bien croire à cette belle histoire, qui me fait plutôt penser à un conte, qui s’est transmise par tradition orale dans la famille Falissard de Las Baldies depuis 1820, et qui m’a été rapportée par ma cousine ; mais rien, aucune naissance rapide ne me le confirme. Pierre Falissard aurait-il fauté avec la jeune Justine ? Nous ne saurons certainement jamais les causes de cette union rapide.
- Avant d’acheter et de s’installer à Las Baldies, Pierre Falissard était fermier à Canet, petit village proche de Las Baldies. L’un des premiers biens du couple, viendra d’une donation faite à Justine de Meallet par testament du 23 novembre 1822, par une cousine du côté maternel : Marie Courbaise, religieuse de l’ordre Notre Dame d’Aurillac, d’un pré dit « La Rivière », sur la commune Marcolès section cadastrale de Canet.
- Pierre Falissard et Justine de Meallet apparemment ne s’installent pas à Las Baldies dans leur nouvelle propriété avant 1840, puisque leur douzième enfant, Jean né à Canet où Pierre est fermier. Mais Pierre ne s’acquitte pas du premier paiement de 5 000 F à la date convenue dans la vente. Les difficultés financières ne font que commencer.
- Dès 1840, le couple ayant certainement besoin d’argent, ils vendent une partie du pré de « La Rivière », par acte du 31 mai. En 1843, ils vendent une petite châtaigneraie dite « Castanier Bas » et en 1846 un pré dit « La Sales ».
- Pierre Falissard ne s’acquitte toujours pas, au décès de Antoine Auzenat qui intervient le 19 décembre 1844, du second versement promis dans la vente.
- Malgré leur proche parenté, les héritiers Auzenat voulant enfin récupérer le montant de la vente du bien de leur mère, assignent en justice Pierre Falissard.
- Pierre Falissard va fuir son créancier : « Faute par le dit Pierre Falissard d’avoir satisfait au commandement préliminaire de la saisie immobilière qui lui a été fait à la requête de Louis Gabriel Auzenat par exploit de Rouzeri huissier à St Mamet du 13 novembre 1847 lequel commandement a été visé le même jour par M. Muratet maire de Marcolès… Il a été suivant procès verbal de Ladoux huissier à Aurillac en date du 24 décembre 1847, visé le même jour par M. Muratet maire de Marcolès , procédé à la saisie immobilière des biens appartenant au sieur Pierre Falissard propriétaire cultivateur à Lasbaldies commune de Marcolès». Les deux fois Pierre Falissard ne recevra pas les commandements, préférant ignorer ses problèmes.

- Il est quand même étonnant qu’une propriété qui faisait environ 18 hectares, qui était par la superficie dans la moyenne pour cette époque, n’ai pas pu faire vivre cette famille. Qui était notre Pierre Falissard ? Question qui restera à jamais sans réponse, l’histoire n’a rien retenu et personne ne se souvient de notre ancêtre.
- Afin de préserver ses biens propres Justine de Meallet fera une demande de séparation de biens.
- Le 1 avril 1848 à l’audience des criées du tribunal civil de première instance d’Aurillac il est procédé à l’adjudication au plus offrant et dernier enchérisseur des biens du dit Pierre Falissard. Ainsi va se présenter M. Louis Breu avoué à Aurillac, pour le compte de Honoré Joseph de Meallet propriétaire et maire de la commune de Marcolès, pour enchérir et prendre adjudication des biens moyennant la somme de 9000 F. Honoré Joseph de Meallet sera déclaré adjudicataire, aucune offre supérieure n’ayant était faite. Grâce à cette acquisition les Falissard peuvent continuer à vivre à Las Baldies, Pierre Falissard devient le « fermier » de son beau-frère. C’est ainsi que le 22 mai 1848 Honoré Joseph de Méallet fait acte d’un bail de 3 années à sa sœur Justine épouse séparée de biens de Pierre Falissard, avec un cheptel de 400 frs, moyennant par an : 7 hectolitres et 50 litres de seigle représentant 123,90 francs, ainsi que 180 francs en argent. Ce qui donne un total de 911,70 francs sur les 3 ans.
- A Las Baldies vont naître les deux derniers enfants de notre couple, Antoine Falissard, le 22 mars 1841, mon tri-aïeul qui épousera en 1869 Eugénie Tabaize et Louise Falissard le 13 janvier 1844.
- Pierre Falissard décède à Las Baldies le 10 mars 1864.
- Le 23 juin 1862 décède subitement Honoré Joseph de Meallet à l’âge de 54 ans, ses biens vont à sa fille unique, Mathilde qui devient la nouvelle propriétaire de Las Baldies. De santé fragile et voulant faire certainement plaisir à sa tante, Mathilde de Meallet fait donation le 19 septembre 1863 de l’usufruit sa vie durant de son bien de Las Baldies à sa tante Justine. Agée à peine de 32 ans Mathilde fait son testament le 2 juin 1866 et décède le 30 janvier 1867 dans sa propriété de Polvrières commune de Sénezergues, terre de la famille de Meallet depuis 1659. Elle lègue à égale part aux enfants de Pierre Falissard et Justine de Meallet son bien de Las Baldies, à cette époque sur les 14 enfants nés de notre couple 9 sont vivants : - L’aîné, Jean marié en 1847 à Anne Nigou est fermier à Mougeac, village voisin de Lasbaldies. - Le second, Joseph marié en 1855 à sa cousine Marguerite Falissard est fermier à Labouyges commune de Marcolès. - Le troisième, Louis marié en 1856 à Marguerite Capredon, il est domestique à Arpajon. - le quatrième, Joseph Paul Honoré marié en 1859 à Jeanne Fabre est domestique à St Simon. - Marianne Juliette l’aînée des filles est domestique à Aurillac et sans alliance. - Louis, le cinquième garçon a lui pour sa part choisi de quitter le Cantal, il est domestique à Paris. - Jean, le sixième garçon, est domestique à Roannes, il avait épousé en 1866, Marie Courchinoux et en secondes noces, en 1884 Elisabeth Roques. - Le dernier garçon, Antoine est resté à Las Baldies où il travaille à l’exploitation agricole. Il épouse le 22 septembre 1869 Eugènie Julie Tabaize, couturière de Sansac-Veinazès. - La cadette, Louise se marie en 1869 à Pierre Monminoux, charpentier de Marcolès. La propriété est sensiblement la même qu’en 1848, voir le plan joint, seul les prés repérés 1, 2 et 3 de l’état de 1848 ont disparus, certainement vendus.
- Justine de Meallet disparaît le 15 octobre 1869, quelques jours après le mariage de son dernier garçon Antoine, elle avait 65 ans. Avec elle s’éteignait la dernière descendante de la famille de Meallet de Polvrières. Sa succession se compose uniquement d’une somme de 2124 F. dont la défunte était créancière, ainsi qu’il résulte de l’acte de donation du 19 novembre 1863, ainsi que du testament de Mathilde de Meallet du 2 juin 1866, la dite somme non productive d’intérêts.
- Après l’arrangement familial Antoine Falissard et Eugénie Tabaize vont rester à Lasbaldies, où vont naître plusieurs enfants, sept exactement, mais trois seulement vont vivre : Marie, née le 24 septembre 1871 qui épousera en 1902 Antoine Brasquies originaire de Boisset, mes arrière-grands-parents. Il s’installeront cultivateurs au Meyniel de Marcolès puis plus tard dans une petite maison de la rue du four de Marcolès. Joseph, né le 13 mai 1878 qui épousera Noémie Lafon. Lucie Marie, née le 17 décembre 1886, qui épousera en 1918, en secondes noces Julien Fleys, dont leur fille unique Henriette vit toujours au moulin du Talarau à Marcolès.
- C’est Joseph, le seul garçon, homme de petite taille, qui va rester et exploiter la propriété, il se marie assez tardivement, en 1921, il a 42 ans, avec Marie Noémie Lafon qui était née en 1899 à Montvert, village à deux pas de Las Baldies, elle a la moitié de son âge. De cette union va naître un seul enfant, Antoine en 1922. - Antoine est le dernier à exploiter et habiter à Las Baldies, il épouse en 1951 Antoinette Lacoste de St Antoine, ils reprennent une exploitation avec des moyens très limités, Joseph le père n’avait pas développé la propriété, « il paraît que ce n’était un grand travailleur ».
- Aujourd’hui Las Baldies n’est plus habité, mais ma cousine Marie José Falissard, la fille d’Antoine, y élève des broutards pour la viande et entretient la propriété.
- Mes souvenirs de Las Baldies, sont bien sûr ceux de mon enfance : la pâture de Lacombe où nous faisions de la luge, le pré de la Baldie avec son petit étang où nous taquinions les canards, les parties de cachette dans la grange entre les bottes de foin ; les vaches, des Salers bien sûr, qui ne donnent leur lait qu’après avoir nourri leur veau, que nous allions chercher au pré pour la traite, faite dans cette écurie au plafond bas typique de notre région et les oies, surtout les jars qui me faisaient toujours peur car ils cherchaient à nous pincer en lançant leurs sifflements. Les balades jusqu’au moulin de « Souquières » où vivaient au XVIIIe siècle, des Souquières meuniers, qui étaient également mes ancêtres, mais ça, je ne le savais pas à l’époque ; les visites chez la cousine Henriette Fleys au moulin de Talarau.
La maison : au rez de chaussée la pièce commune avec son cantou, la cuisinière au bois, la grande table de ferme avec ses grands tiroirs d’où sortaient de grandes tourtes de pain bis. En bout de table une pendule, en face de celle-ci un buffet. La chambre ou j’ai couché quelques fois, lorsque avec ma grand-mère nous venions, conduits par le car d’Albert Suc de Marcolès, qui nous laissait à l’Enseigne, nous faisions le reste du chemin à pied. Attenante à la maison, une construction plus récente, où l’on trouve la souillarde avec l’écrémeuse pour faire le beurre. A l’étage la chambre de ma cousine Marie José, et le grenier où séchait la récolte de blé.

Yves MARRET.